Elle contemplait ses mains sans vraiment les reconnaître.
Autrefois si belles, elles avaient été son orgueil, aujourd’hui si flétries, si ratatinées, elles lui faisaient horreur !
Elle plongea son regard au creux de ses mains et sa vie défila comme dans un miroir. Ses mains lui renvoyèrent le vide, le superficiel de son existence paresseuse et égoïste.
Au fil des souvenirs, elle se revit si envieuse du bonheur des autres mais exigeant toujours de recevoir sans rien donner, trop avare d’elle-même !
Elle regretta ses mains qui avec gourmandise s’étaient souvent fourvoyées dans la luxure distribuant du plaisir mais jamais d’amour.
Elle se reprocha surtout ses mains trop souvent en colère contre sa petite fille qui réclamait à corps et à cris cette mère qu’elle ne voulait pas être et son ressentiment quand Marie, adulte l’avait finalement délaissée !
Depuis son réveil elle n’avait cessé de penser à sa fille, elle avait tant à lui dire !
Elle se sentit soudain si seule, si lasse, si abandonnée, si honteuse.
Ce fut comme un appel. Marie ne comprit pas ce qui l’avait poussé, après tant d’années d’ignorance, à rendre visite à sa mère,
Avant d’entrer dans la maison de retraite, elle avait éprouvé le besoin d’une longue promenade dans le parc attenant au bâtiment. Là encore, une force mystérieuse l’avait conduite à travers les allées pour puiser dans la magie de l’automne la force d’affronter le regard de sa mère. Elle avait foulé le parterre de feuilles mortes et senti craquer sous ses pieds des noix . Le vent chuchotait, quelques feuillent vertes ondulaient dans les arbres alors que d’autres, déjà jaunies, valsaient dans les airs. Ici, dans l’herbe, un tapis roux et brun exhalait des parfums d’humus, là des effluves de jasmin, portées par le vent, lui chatouillèrent les narines. Plus loin, sous les grands hêtres, des champignons sortaient de terre, elle respira à plein poumons cette odeur de terre mouillée, de mousse. Le soleil illuminait la palette des tons d’automne. Le rouge des érables, l’or des bouleaux, l’oranger des sumacs, le brun des châtaignes l’apaisèrent. Cette autre dimension perçue depuis le matin ne la quittait pas , le vent lui murmura « il est temps Marie » , elle laissa alors s’envoler des années de souffrance, de rancœur, cette rancune si tenace qui empoisonnait son existence et la retenait prisonnière, cette rancune qui étouffait aussi sa mère ! Oui ! Il était temps de pardonner et de sourire enfin à la vie !
Dans l’entrebâillement de la porte Marie observait sa mère ! Celle-ci ne l’avait ni entendu, ni vu, elle fixait ses mains, des mains qui avaient immédiatement aimanté le regard de Marie. Avec effroi, puis soulagement et enfin espoir, elle avait partagé les visions de sa mère dans une communication surnaturelle, sans masques, sans retenues !
Marie était prête, elle attendait de croiser le regard de sa mère. Par la magie de son sourire et de ses larmes, elle voulait lui offrir son pardon pour qu’enfin, naisse et se dise entre elles, l’amour.
La vielle femme releva la tête. D’un geste rageur, un rictus aux lèvres, elle balaya de la main ses regrets, ses remords.
Alors, le ciel s’obscurcit, le vent hurla à travers les persiennes. Elle tourna la tête, elle ne regardait plus ses mains, elle ne voyait plus rien !
Marie en pleurs, s'en retourna ! Combien de temps, combien de temps encore ?
Alors, comme une vague d'espoir dans un océan de larmes, une chanson la submergea, l'emmenant résolument vrers une autre rive, celle du temps qui reste !
" Le temps qui reste" Isabelle AUBRET
Ce texte comme un défi, comme un jeu, répondait à plusieurs consignes d'ateliers d'écriture :
Magique !
Au travers d'un texte, il faut faire intervenir un ou plusieurs éléments magiques !
Qu'est-ce que quelque chose de magique ? Tout ce que vous voulez, du moment que vous savez l'amener. Il ne faut pas entendre par magie uniquement ce qui est du ressort des prestidigitateurs et qui (je suis désolé de l'apprendre à certains) est l'oeuvre de trucs et autres
artifices. Non, revenons-en à notre âme enfantine, tout est possible. A vous les apparitions, les envolées, les disparitions, les transformations, les rencontres étranges, etc... En élargissant le champ
de votre possible, j'espère ne pas vous perdre au milieu d'un océan de possibilités.
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Le huitième péché capital
Les 7 péchés capitaux vous connaissez ? Vous en imaginez un huitième non répertorié et vous ferez de l’ensemble le thème de cette proposition.
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La main
Le rôle de la main symbolise parfois la transformation du singe en homme, darwinienne ou pas, votre proposition fera de la main, « le cœur » de votre proposition.
Contraintes supplémentaires en option :
le titre comportera le mot main, l’incipit en sera : « Elle contemplait sa main sans vraiment la reconnaître… » et l’excipit « elle ne regardait plus sa main, elle ne voyait plus rien ».
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L'automne
L'automne est la meilleure saison pour les plantations de toutes sortes. A la manière d’un jardinier, j’aimerais que vous semiez des mots dans un décor automnal. Ramassez et brûlez les feuilles mortes, éliminez les mots fanés et plantez de nouveaux bulbes !
Recréez un espace coloré qui sera le vôtre, dans une saison où certains changements s’opèrent (brouillard, rosée, jours plus courts, nuits plus froides, etc).
Donnez-nous envie de fouler ce parterre de feuilles mortes !
En fin de description, vous devrez vous situer, vous, dans ce spectacle grandiose (l’automne comme synonyme pour le commun des mortels que nous sommes, de la nature qui somnole, du temps qui s’écoule, de la vieillesse qui avance, des rêves qui s’envolent, l’automne comme moment de questionnement, etc..).